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À quelque distance d’Arras, nous aperçûmes un bois assez considérable nous n’hésitâmes point de le traverser, quoiqu’il n’y eût presque plus de jour à terre, et en vingt minutes nous fûmes portés d’Arras dans la plaine de Beuvry, distante d’un quart de lieue de Béthune en Artois. Comme nous n’avions pu juger dans l’ombre le corps d’un vieux moulin sur lequel nous allions porter, nous nous en éloignâmes avec le secours de nos rames, et nous descendîmes au milieu d’une assemblée nombreuse d’habitants ; ils ne furent point effrayés de voir notre machine, attendu que M. le prince de Ghistelles-Richebourg, protecteur et amateur zélé des sciences, venait de faire ce jour même une expérience dont ils avaient été témoins. Ce prince nous aborda avec le prince son fils ; ils nous demandèrent notre nom, et nous offrirent de nous rendre avec notre machine à leur château. Nous fîmes tous nos efforts pour conduire notre machines dans le parc du château, à l’aide de tous les habitants du canton, qui se prêtèrent à nous obliger, et à conserver nos machines avec un zèle et une joie qu’il est difficile de peindre. M. le prince de Ghistelles nous fit l’honneur de nous accueillir en son château avec une bonté dont nous ressentons d’autant mieux le prix, qu’il nous est plus impossible de la rendre[1] (fig. 47).

Telle est l’expérience qui fut entreprise vers la fin de l’année 1784, à l’aide du premier aérostat allongé muni de propulseurs à rames.

Si l’idée de ce mode de navigation aérienne date de l’origine de la découverte des ballons, on a vu que celle d’utiliser les courants aériens n’est pas moins ancienne.

Pendant que les curieuses expériences des frères

  1. Mémoire sur les expériences aérostatiques faites par MM. Robert frères, in-4o. Paris, 1784.