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aérienne autre chose que les bourrelets de l’enfance[1].

Pour lutter contre l’air, il faut être spécifiquement plus lourd que l’air.

De même que spécifiquement l’oiseau est plus lourd que l’air dans lequel il se meut, ainsi l’homme doit exiger de l’air son point d’appui.

Pour commander à l’air, au lieu de lui servir de jouet, il faut s’appuyer sur l’air, et non plus servir d’appui à l’air.

En locomotion aérienne comme ailleurs, on ne s’appuie que sur ce qui résiste.

L’air nous fournit amplement cette résistance, l’air qui renverse les murailles, déracine les arbres centenaires fait remonter par le navire les plus impétueux courants.

De par le bon sens des choses, — car les choses ont leur bon sens, — de par la législation physique, non moins positive que la légalité morale, toute la puissance de l’air, irrésistible hier quand nous, ne pouvions que fuir devant lui, toute cette puissance s’anéantit devant la double loi de la dynamique et de la pondération des corps, et, de par cette loi, c’est dans notre main qu’elle va passer.

C’est au tour de l’air de céder devant l’homme ; c’est à l’homme d’étreindre et de soumettre cette rébellion insolente et anormale qui se rit depuis tant d’années de tant de vains efforts. Nous allons à son tour le faire servir en esclave, comme l’eau à qui nous imposons le navire, comme la terre que nous pressons de la roue.

Nous n’annonçons point une loi nouvelle : cette loi était édictée dès 1768, c’est-à-dire quinze ans avant l’ascension de la première Montgolfière, quand l’ingénieur Paucton prédisait à l’hélice son rôle futur dans la navigation aérienne.

  1. On verra dans la dernière partie de cet ouvrage que des expériences récentes ont démontré l’inanité de ces raisonnements.