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par son bon ange, lui pinçait le cœur, elle disait, comme Ève dans l’Éden : « Je n’ai rien fait de mal. » Et pourtant, ô Naïs, si vous n’aviez pas mangé la pomme, m’est avis que, sans la cueillir, vous l’aviez flairée.


« Sais-tu bien ce que l’on raconte d’Elzéar et de Palma ? demanda Mme du Fargeas à son frère, après certaines réflexions qu’elle avait faites. La veut-il épouser ou c’est-il façon de cousinage, ces promenades et ces tête-à-tête ?

— Hé ! ma sœur, laisse cancaner les gens. Il n’y a rien que d’honnête entre les Fontclose, rien que la marquise ne connaisse, heure par heure, comme tu connais toutes les actions — je dirais même toutes les pensées — de notre petite Naïs, cette blanche brebis. D’ailleurs, je suis là, et l’on ne m’en ferait point accroire. »

Il se rengorgea dans son col. Non ! jamais femme ou fille ne ferait prendre vessies pour lanternes à Zerbin de Fonard !

« Jure-moi, Zerbin, que tu ne quitteras jamais ta nièce, quand elle sera dans une maison étrangère, et même chez nos meilleurs amis, même chez des parents. Si je n’avais cette assurance, jour de Dieu ! je fermerais la cage sur l’oiseau… Il ne me plairait pas qu’on parlât de Zénaïde, comme on le fait de Palma. Mais tout ceci ne durera guère. À la fin de ce