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JOURS DE BATAILLE

désarme avant de les envoyer à la police. Tout à l’heure, on vient d’arrêter deux faux hodjas, aux poches capitonnées de banknotes, et on les a houspillés quelque peu… Maintenant, quatre soldats conduisent un officier réactionnaire, qui n’a plus d’épée, dont le dolman sombre est déchiré à l’épaule, et qui marche, pâle, calme, l’air distrait. Devant le consulat américain, une foule pressée stationne, attentive aux moindres incidents, nerveuse, prête à s’enthousiasmer ou à s’affoler… Et parfois, à grand trot, à grand bruit, passent des cavaliers, des fourgons qui sonnent la ferraille, des civières, des voitures aménagées pour les ambulances, un équipage correct, avec un cavass d’ambassade sur le siège.

Le canon s’est tu ; la fusillade, vers huit heures, devient plus lointaine, plus espacée… On sait que les casernes de Chichli et du Taxim ne résistent plus, que l’armée de Salonique occupe toutes les hauteurs de Péra et se dirige vers Yldiz. À Galata, quelques caracols se défendent encore, et les ponts étant barrés, nul