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LA VIE AU HAREM

différence à leur avantage. La jeune fille éprouve le plus vif, le plus doux sentiment de fierté, pendant cette courte royauté des fiançailles. Elle reçoit l’hommage du désir de l’homme, qui demande ou feint de demander l’amour comme une faveur suprême. Elle sent sa dignité, sa jeune puissance, son prestige féminin. Les souvenirs de ces heures mettent une lumière dans sa vie qui sera, peut-être, grise, triste et déçue…

— Nous autres, nous ne connaissons pas l’amour, tel que vous le ressentez, — tel que vous le recherchez, dit gravement madame L… pacha. — Nous souhaitons aimer le mari qu’on nous destine ; nous nous attachons souvent à lui, par une grande et forte affection… Mais l’amour… la passion ?… Nos enfants seuls nous inspirent une tendresse passionnée. La maternité est le seul amour permis que nous goûtions dans sa plénitude.

— Cependant madame Ange et Djavid pacha ?…

— Oh ! c’est un bel homme, Djavid pacha.