tiennent soulevé par les épaules. Je vois ses bras qu’agite un tremblement continu, sa poitrine large et musclée qui halète, halète, comme dans la torture. Et je vois aussi une face cadavéreuse, suante, les yeux hors de l’orbite, la bouche ouverte par un gémissement qui dure, qui m’entre dans les oreilles, qui me fait mal. Sélika m’attire de côté. J’aperçois la plaie monstrueuse, tout le dos fendu, l’épaisseur de la chair à vif, et les médecins qui travaillent dedans.
Voilà donc ce que fait la guerre ! Pour la première fois m’apparaît l’être pitoyable entre tous, le blessé, dans sa nudité toute vive, saignante et purulente. Je ne peux plus penser que la folie des hommes a rendu parfois nécessaire et légitime cette abomination, que la lutte peut être le devoir sacré, l’expression suprême de l’héroïsme et du désintéressement, et que des individus doivent souffrir et mourir comme celui-là pour qu’un peuple vive. Je ne peux plus penser avec mon cerveau façonné par l’éducation. Je sens, seulement, dans tout mon cœur de