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D’UN NOUVEAU RÈGNE

Pacha célèbre les mérites de la France, et ceux des Jeunes-Turcs, et il laisse deviner qu’il a beaucoup souffert, vraiment, du temps de l’Ogre… Pendant dix ans, il a dû habiter Yldiz, demeurer jour et nuit à la disposition d’un maître maniaque, renoncer presque à la liberté, à l’amitié, à la famille. Il est devenu, à ce régime, presque aussi vieux que son impérial client, malgré la différence d’âge de quinze années, et peut-être beaucoup plus malade. Il bénit la révolution qui lui permettra d’aller se soigner en France, cet été.

Tout ceci, par bribes de phrases, avec la sereine prudence de l’Oriental qui ne livre rien de son intime pensée et décourage la curiosité étrangère. On se dit : « Que de choses a vues cet homme ! Que de secrets il conserve dans sa mémoire ! Si je le connaissais mieux, si j’avais le temps de le faire parler !… » Mais on s’abuse. L’homme d’Orient, après dix ans comme après deux heures, ne dit que ce qu’il veut dire.

Il est aussi très difficile de pousser une enquête, d’obtenir des réponses précises et