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PREMIERS JOURS

mal habillé, l’air malade, le teint jaune, plus jaune encore sous le fez rouge vif. Il s’excuse de ne pas parler français, tend la main, salue, sourit, et nous nous asseyons tous les trois pendant qu’on apporte le café. Ce bon vieux monsieur, c’est Ibrahim Pacha, directeur de l’hôpital, qui fut médecin particulier d’Abdul-Hamid pendant dix années.

Je crois que nous allons commencer notre visite aussitôt les présentations faites, et les politesses échangées. Mais en Orient, la lenteur est une forme obligatoire de la courtoisie et les gens bien éduqués ne sont ou ne paraissent jamais pressés de rien. Toute cérémonie exige, au préalable, d’infinis discours, des compliments réciproques, et même des silences où les interlocuteurs se contemplent en souriant, avec une mine placide qui signifie : « Je n’ai plus rien à dire, mais je ne m’ennuie pas avec vous, et je reste ici parce que votre compagnie me plaît et m’honore. »

La conversation du pacha — M. Bareille servant d’interprète — est laborieuse. Ibrahim