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ET DE RÉVOLUTION

le conduire au Séraskiérat où s’accomplirait la cérémonie du Béiat ou allégeance.

Déjà, le chef d’escadron Habib bey, député de Bolou, s’était rendu en toute hâte au palais de Dolma-Baghtché, afin de s’assurer du consentement de Réchad. Le prince terminait sa toilette. Il reçut le mandataire du Parlement qui lui recommanda de « conserver tout son calme », ce à quoi Réchad Effendi répliqua, non sans à-propos, qu’il « conservait son calme » depuis trente-trois ans !

Depuis trente-trois ans, en effet, il vivait dans une réclusion presque complète, entouré d’espions, surveillé jusque dans l’intimité du harem. Il ne pouvait prononcer une parole qui ne fût aussitôt rapportée à Yldiz ; il ne pouvait témoigner à quiconque un sentiment de bienveillance sans être signalé à la vindicte du Sultan. Aucun habitant de l’Empire n’eût osé le nommer tout haut ; et il n’y a pas d’exemple qu’un enfant nouveau-né eût reçu ce nom de Réchad, assez répandu naguère dans le peuple. Quand le prince sortait en voiture, — après