fleuves humains s’unissent et se confondent. L’îlot marmoréen de la mosquée émerge, pâle dans les vibrations diamantées de la lumière. Les minarets montent ainsi que des mâts et des phares où les muezzins perchés ont des voix lointaines d’oiseaux. Au fond de la place, le Séraskiérat ouvre sa porte en arc de triomphe, flanquée de pavillons mauresques. Et sur l’esplanade, parmi les grêles petits arbres verdissants, c’est un fourmillement inouï de fez rouges, de turbans verts, de calottes blanches, d’uniformes, de guenilles, de redingotes. Pas de cris, pas de chants. Les pieds feutrés glissent, les voix se mêlent en une monotone rumeur, les couleurs seules font tapage. De loin en loin, un commandement bref, un galop scandé, une voiture qui roule, un train d’artillerie qui tressaute…
Dans le double flot militaire qui coule et reflue sans cesse de la place à la cour intérieure du Séraskiérat, les prisonniers sont entraînés. Personne ne les insulte. Ils vont, calmes, vers leur destin. Beaucoup de hodjas et de softas,