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ou dans cette infirmerie de Maison-Rouge dont l’odeur et l’aspect faisaient horreur ; quand nous marchions, seuls à travers la forêt, quand je vous faisais lire, d’une voix hésitante et basse, les vers que je venais de traduire.

» Je voyais à peine votre visage ; à peine aurais-je pu dire la couleur de votre robe, mais je m’efforçais de suivre les moindres mouvements de votre sensibilité. L’être intérieur que vous me dérobiez m’attirait invinciblement. Bientôt, je fus dominé par ce besoin de le connaître. C’était beaucoup plus que de l’amitié ; était-ce de l’amour ? Je n’ose répondre… Il y a plus de sentiments dans le cœur humain qu’il n’y a de mots pour les désigner dans l’humain langage. Ma passion était parfaitement chaste. La volupté de la possession spirituelle m’éblouissait, car — je vous en fais l’aveu — celle-là je ne l’avais, autrefois, ni réclamée, ni obtenue. Je n’avais désiré, des femmes, que leur grâce et leur tendresse, et la plus aimée, qui m’avait donné tout cela, n’avait rien de plus à m’offrir.