Madame de Préchateau parlait d’une voix aiguë et agressive.
— Crois-tu que je m’amuse, moi ? Crois-tu que cela me plaise de rester étendue et d’avoir, pour me servir, cette vieille Désirée qui est impotente et presque sourde ? Moi qui ai possédé une belle maison, des domestiques bien stylés, des amis élégants ; moi qui ai goûté la vie mondaine que tu ne regrettes pas, toi, puisque tu ne l’as pas connue !… Eh bien ! je m’occupe, je brode, je lis — je relis, car nous n’avons pas souvent des lectures nouvelles, — je pense au temps passé, je crois le revivre, et cela me fait supporter le présent…
Un journal illustré glissa de la table sur le tapis. Laurence le ramassa. C’était une Revue de la Mode, datée de 1880. On y voyait un portrait de Sarah Bernhardt, celui de Victor Hugo tenant ses petits-enfants sur ses genoux ; et des silhouettes de dames au chignon tressé, aux robes collantes allongées en longues traînes avec beaucoup de nœuds, de pampilles et de volants.