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vieux. Pourtant, son aspect ne révèle pas la grande misère : il n’a pas les tares apparentes de l’alcoolique ; il paraît sain malgré l’usure précoce… Le mal qui ronge l’enfant ne vient pas de lui, sans doute. Mais il y a la mère dont on ne parle pas…

Où est-elle ? Plus lointaine que les morts, gâtée de chair et d’âme, — perdue !… L’aïeule, gardienne du foyer ravagé, l’enfant pâle qu’effleure l’ombre terrible, c’est tout le pauvre bien de cet homme, sa raison de vivre, ce qui, mieux que le sol et les cités, mieux que les grands noms écrits sur les pierres, représente pour lui la patrie. Faible devant l’enfant idolâtré, il s’épouvante de ces complications que le moindre événement produit dans la vie des humbles ; il redoute le médecin, madame Dobre, Laurence, et plus que tout, les reproches de la grand’mère et le désespoir du petit. Il tremble en imaginant la séparation… Cette épreuve, qui s’ajoute aux épreuves passées, aux souffrances de la guerre, comme une méchanceté spéciale du sort, n’est ici qu’un