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la femme et son secret

vite possible. La vie est terne. La vie est décevante. Il faut la voir dans sa vérité, et l’accepter dans sa médiocrité. »

La jeune fille, ainsi avertie, ne paraissait pas convaincue. Elle me demanda d’écrire, à mon tour, quelques-unes de ces pensées « sublimes » que tous les écrivains ont en réserve, à l’usage des albums. Je ne perdis pas cette occasion de contredire le donneur de conseils lugubres. Et j’écrivis, dans le feu de l’indignation :

« Mademoiselle, n’en croyez pas M. X… Il n’a plus d’illusions, encore qu’il ne soit pas vieux. C’est l’effet d’une disposition morale qui lui est particulière, et qu’on ne doit pas regretter puisqu’elle a produit de belles œuvres. Mais, au nom du ciel, Mademoiselle, qui avez des illusions, conservez-les, le plus longtemps possible, puisqu’elles vous montrent la vie belle et brillante, et vous donnent le courage d’y entrer gaiement. Quand elles seront fanées, laissez-en fleurir d’autres. Il en est pour toutes les saisons de la vie. Croyez que la jeunesse dure longtemps, et vous vieillirez moins vite. Croyez que l’amour existe, et vous le ferez naître. L’amour et le bonheur,