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LA FEMME ET SON SECRET

chiffonnées et pourrissantes. Le ciel violet s’assombrit. Tu te souviens du jardin de mai et du jardin d’octobre, où, par les soirs dorés, t’attendait l’amour.

Rentre à la maison. Ferme bien tes volets. Allume ton feu et ta lampe. Le feu et la lampe sont aussi beaux que les rosiers en fleur. Ta chambre, où le moindre objet, à force d’avoir duré, devient une chose vivante, est un jardin sentimental, parfumé de souvenirs. Des livres parleront, si tu veux, à ton cœur, pour le rassurer, à ton esprit pour l’enchanter. Des portraits sont autour de toi, comme des âmes. Tu pleurerais, je le sais bien, si tu étais seule. Ne pleure pas. Tu n’es pas seule.

Tu me dis que l’amour n’entrera plus chez toi. Regarde : voici l’amitié qui a deviné ta peine. Elle vient, à cette heure qu’elle a choisie, s’asseoir en face de toi, devant ton feu qu’elle ranime. Douce amitié, parée des couleurs de l’arrière-saison, elle ressemble à l’amour ; elle est peut-être la suprême figure de l’amour, qui te sourit en silence avant de s’effacer dans la nuit.

Ce n’est plus le temps d’être belle : c’est le