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LA FEMME ET SON SECRET

jalouse, et plus jalouse encore de son fils que de sa fille. Contre elle, le gendre se défend quelquefois, mais la bru est dévorée.

Tel est le portrait classique de la belle-mère, tracé par les humoristes du xixe siècle.

Avant ce temps-là, et la prééminence de l’esprit bourgeois qui date de la révolution de Juillet, la belle-mère a, dans la vie, un rôle respecté, et, dans la littérature, une figure humaine. Il y a bien Mme Pernelle, mais cette personne qui a le verbe haut, dit son fait à chacun, et n’est pas moins « assotie » de Tartufe que son fils Orgon n’est pas du tout une méchante femme. C’est une cousine, dans un monde plus élégant, de Mme Jourdain. Et Mme Jourdain elle-même, l’excellente créature, bon bec de Paris, tendre mère et sage épouse, comment regarde-t-elle son futur état de belle-mère ? Elle ne veut pas donner sa fille à un gentilhomme qui la mépriserait, elle, Mme Jourdain, sortie d’une famille de marchands. Ce qu’il lui faut, c’est un honnête bourgeois, avec du cœur et des écus, un homme de son rang, à qui elle puisse dire sans cérémonie :

« Mettez-vous là, mon gendre, et dînez avec moi. »