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L’HÉROÏSME FÉMININ

d’or » d’un souvenir voluptueux. Il disait qu’un homme et une femme ne connaissent pas la perfection de l’amitié, s’ils n’ont pas été amant et maîtresse. Chacun d’eux retrouve alors, dans les yeux de l’autre, une image secrète qui est leur trésor commun. Ils goûtent un délicat plaisir à se rappeler ensemble l’heure où se confondirent l’amour et l’amitié. À voir les anciens amants, l’on doit penser que ce raffinement sentimental est le privilège d’un bien petit nombre, et La Rochefoucauld répond, par avance, à Sainte-Beuve « qu’il y a peu d’amants qui n’aient pas honte de s’être aimés lorsqu’ils ne s’aiment plus ».

Pas de « clou d’or » dans le passé de M. de La Rochefoucauld et de Mme de La Fayette. L’a-t-elle regretté ? Si elle ne l’a pas regretté, pourquoi veut-elle tant de mal à ceux qui s’aiment ? Elle ne leur permet jamais, dans ses livres, le bonheur qu’elle n’a pas eu dans sa vie, et celui qu’ils pourraient avoir, elle l’empoisonne par la jalousie. Quelle galerie de jaloux dans ses romans ! Qu’ils sont vrais, qu’ils sont naturels ! Où a-t-elle pris ses modèles ? Chez M. de La Rochefoucauld ou dans son propre cœur ?