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L’HÉROÏSME FÉMININ

Ce cas est moins exceptionnel qu’on ne pense. La femme n’est pas toujours très consciente des motifs qui la déterminent. Elle croit qu’elle revient à la vertu, tandis qu’elle obéit à l’intérêt et à la peur.

La vraie jalousie amoureuse ne connaît ni l’intérêt, ni la peur. Elle crée, lorsqu’elle dure, un état morbide de l’âme, où l’idée de la trahison se fixe comme un clou. Le clou est impur, et il infecte le tissu où il s’enfonce. Il n’est pas de souffrance morale comparable à celle-là, si cruelle que la douleur physique lui paraît une trêve bienfaisante. Qui l’a connue, comprend le geste libérateur de ceux qui se délivrent de l’obsession par le crime ou par le suicide. Ils n’ont pas su que pour guérir il suffisait d’attendre. Encore faut-il pouvoir attendre. Les malheureux qui s’évadent de leur enfer de jalousie dans la mort, s’ils avaient supporté leur torture quelques jours ou quelques semaines de plus, l’auraient sentie décroître. Entre leur capacité de résistance et leur douleur, l’équilibre s’est rompu.

« S’ils avaient réfléchi, disent les bonnes gens, s’ils avaient raisonné… »

La passion, au degré démentiel où la ja-