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L’HÉROÏSME FÉMININ

drigue. Elle y est obligée par la loi de l’honneur, mais cette tête si chère, elle serait bien fâchée de l’obtenir. Elle est héroïque par force et ravie de ne plus l’être, quand elle peut enfin, décemment, épouser le meurtrier du comte Gormas.

Camille n’est pas héroïque à la façon de sa terrible famille. Rome n’est rien pour elle, au prix de son Curiace bien-aimé. À défaut du courage civique, (sentiment qui, chez la femme, est l’effet de l’éducation, et, si noble qu’il soit, toujours artificiel), Camille a le courage de l’amour. Elle brave son frère, en sachant bien qu’il la tuera. Ses cris de tigresse viennent de sa féminité, tout comme les fureurs d’Hermione et de Roxane.

À l’autre extrême, au degré le plus haut, il y a Jeanne d’Arc, la guerrière et la sainte. Mais Jeanne n’est pas une femme. Elle est une vierge. Toutes les victimes féminines des grandes causes, jeunes têtes dévouées à la mort, et dont aucun homme n’a dénoué les cheveux, sont des vierges. Vierge, Charlotte Corday, l’ange de l’assassinat. Vierges, les Vestales ; vierges, les druidesses ; vierges, les Sibylles. Dès que l’amour les saisit, le dieu qui