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l’écrivant, mon inexpérience. Mais, si les maladresses de la forme gênaient l’expression du sentiment, le sentiment était sincère, et j’ose dire qu’il pouvait vous intéresser, parce qu’il n’était pas personnel : j’ai dit ce que beaucoup de femmes pensent — ou ce qu’elles penseraient, si elles étaient, toutes, des travailleuses. — Et que vous vous déclariez féministe ou non, il n’importe, puisque vous l’êtes, de fait… Cela devrait suffire à vous attirer des lectrices. Mais ne vous étonnez pas si je souhaite que vous ayez surtout des lecteurs ! Puissiez-vous les rendre plus justes — je ne dis pas plus indulgents — pour la femme.

» Hier matin, j’étais bien loin du féminisme, et je vous avouerai que la « rebelle », inclinait à la résignation. Oui, je me décidais presque à ne plus quitter Chartres, à ouvrir une petite école, bien que le métier d’institutrice ne me plût qu’à moitié. Mais j’ai reçu, en même temps que la vôtre, une lettre de M. Foucart. Dois-je attribuer au hasard ou à votre intervention la bienveillance imprévue de mon ancien directeur ?

» Je n’hésite pas… Je connais M. Foucart. Il est sensible aux jugements d’autrui, et sans doute il pense, à cette heure, tout le bien qu’on lui a dit de moi.

» Il me semble, monsieur, que je ne dois pas vous laisser ignorer ces choses, et ce serait fort mal à moi de ne pas vous remercier.

» JOSANNE VALENTIN. »

« Je connais Chartres, madame… Je connais la place où vous demeurez… Quand j’ai lu votre lettre, tout à l’heure, dans la rue, appuyé contre la grille du Baptistère, j’ai vu, tout à coup, une vieille ville,