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le soulager un peu… » Mademoiselle Miracle, accourue à Paris, disait : « Il y aura chez moi le gîte et la pâtée pour tous… Quittez le Monde féminin, ma chère Josanne ! Soyez toute à notre pauvre malade… » Et Josanne avait consenti…

Pierre était mort, dans ses bras. Il l’avait remerciée et bénie… Et sitôt après les obsèques, elle s’était couchée, à son tour, épuisée, anémiée, sombrant toute dans un chagrin muet et morne, où elle n’éprouvait plus ni amour, ni mépris, ni colère, ni douleur, — rien que l’étonnement de vivre…

À peine rétablie, elle apprenait, par le journal, le mariage de Maurice avec mademoiselle Gaussin-Lamberthier, « nièce du grand ingénieur ». De tout ce qu’elle avait aimé, il ne lui restait que son petit Claude. Elle ne se demandait plus, comme naguère, si elle avait droit au bonheur. Elle ne cherchait plus le sens de son devoir et la règle de sa vie… Son devoir était tout simple maintenant ; sa vie toute droite… Souffrante encore, elle achèverait de rétablir ses forces chez mademoiselle Miracle. Des leçons, dans un pensionnat, dans les familles, lui permettaient de payer son entretien… Après ?… Josanne comptait bien revenir à Paris, retrouver son emploi… Mais les Foucart l’avaient remplacée !… Ils la reprendraient peut-être. Cette hypothèse désolait mademoiselle Miracle : l’excellente vieille fille souhaitait garder Josanne et le petit, longtemps, toujours…

— Pourquoi, disait-elle, ne pas vous fixer à Chartres, ouvrir une petite école, élever votre enfant avec les enfants des autres ? Je suis honorablement connue dans la ville, et monsieur le curé de Saint-