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cœur des petites abonnées provinciales, Bovarys de Limoges ou de Quimper-Corentin.

Le succès était venu… Madeleine Foucart, qui recevait à dîner des hommes politiques, espérait le ruban rouge… Un peu avant le 1er janvier, un peu avant le 14 juillet, des journalistes annonçaient, bruyamment, la promotion certaine de la « plus jolie femme de Paris » dans l’ordre national de la Légion d’honneur. Mais les ministres, au dernier moment, étaient lâches…

« La plus jolie femme de Paris », qui était aussi l’ « ange de la charité » et la « grande féministe », posa son porte-plume d’écaille et d’or. Et, durement :

— J’ai défendu qu’on me dérange… Allons, parlez, et faites vite !…

Elle n’aimait pas cette Josanne, pauvre, médiocrement habillée et très orgueilleuse. Elle n’aimait que madame Lagny, mademoiselle Flory, et quelques rédactrices intermittentes et flagorneuses. La grande féministe avait sa cour.

Josanne expliqua l’étrange fantaisie de mademoiselle Brémond.

La directrice prit le téléphone sur son bureau :

— Isidore, venez, je vous prie…

M. Isidore Foucart parut bientôt. Un bel homme aux yeux noirs, à la fine moustache rousse, l’air d’un Bel-Ami arrivé, enrichi, rangé… Il salua Josanne d’un signe de tête.

Il était familier avec elle, comme avec toutes les femmes, ayant gardé les manières de sa jeunesse, — de ce temps heureux où il était secrétaire des Bouffes ! — Mais sa familiarité n’était pas insolente. Il estimait