Page:Tinayre - La Rebelle.djvu/40

Cette page a été validée par deux contributeurs.

aimait encore d’une tendresse quasi maternelle, Josanne éprouvait une répulsion invincible, une révolte de tous ses sens. Son corps, frais et pur, exécrait le corps malade… Mais, pitoyable au chagrin de Pierre, elle ne savait pas, elle ne pouvait pas se refuser !… Après les affreuses nuits, son désir s’en allait, irrésistible, vers Maurice, et elle se croyait, non pas avilie, mais lavée, par des caresses saines et franches, par une volupté qui, pour les deux amants, était de l’amour…

Pourtant elle revenait à son mari ; elle tenait à lui comme à une partie d’elle-même, — un être en qui sa propre vie se prolongeait par la longue habitude commune. — Souffrant et malheureux, il n’avait qu’elle : elle ne l’abandonnerait jamais…


Étendu sur le lit, Pierre gardait le flacon débouché sous ses narines. L’odeur de l’éther se répandait, écœurant Josanne… Elle murmura :

— Assez, Pierre !… Tu seras plus mal, après…

Il se plaignit d’une douleur qui le pinçait à la nuque, d’un frémissement dans la colonne vertébrale…

— Mes pieds et mes mains sont glacés… Touche !… Oh ! oui, frictionne-moi, comme ça… Encore !… Mon sang ne circule pas… J’ai les muscles de la figure figés…

Elle frottait, massait fortement les mains de son mari. Il gémissait, par intervalles :

— Là… là… Tu ne sais pas bien… Donne-moi la boule d’eau chaude…

Elle courut à la cuisine, alluma le gaz, fit chauffer l’eau… Pierre se calmait peu à peu. Il s’informa du