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duretés de Noël n’étaient que les accidents passagers d’une crise… Elle les oubliait dès que Noël redevenait tendre, comme il savait l’être, avec des gaietés, des effusions, des câlineries qui la ravissaient…

Ces heures douces passaient trop vite, mais chacune d’elle laissait sa trace… Noël commença de croire au bonheur.

Patiente, soumise, attentive, Josanne tissait autour de lui le suave réseau de l’habitude amoureuse… Et bientôt il fut sien comme elle était sienne. Il l’aima avec toute la frénésie de sa jeunesse, sans réserve, sans prudence et sans pudeur…

Et Josanne le chérissait de plus en plus, avec un émerveillement naïf. Il n’était plus son ami ; il était « son homme » — comme eût dit, expressivement, la Tourette. — Et elle s’attendrissait en songeant à ce lien nouveau qui les unissait, à ce grand et doux mystère où tous deux trouvaient encore autant d’émotion que de plaisir.


« Un maître ?… »


Ce mot revint encore à l’esprit de Josanne, quelques heures plus tard, chez Noël. Elle renouait ses cheveux, assise devant une console qui supportait un miroir ancien. Dans le cadre ovale du miroir, elle apercevait le grand lit de cuivre aux boules brillantes, la courtepointe de soie jaune qui glissait, Noël, renversé dans un fauteuil, la cigarette aux lèvres… Les stores, couleur de maïs, filtraient la lumière blonde. Sur la toile écrue des murs, de vieilles estampes an-