Page:Tinayre - La Rebelle.djvu/309

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Zut !… et zut !…

Elle plaisantait, mais mademoiselle Bon secoua la tête :

— Enfin ! dit-elle, je veux croire qu’il existe entre vous et… celui que vous avez choisi, une véritable harmonie intellectuelle… Mais dans l’amant, comme dans le mari, il y a un maître… Méfiez-vous !…


Un maître ?…

Josanne méditait le conseil de mademoiselle Bon dans l’omnibus qui l’emportait vers la place des Vosges… Elle se rappelait l’attitude de Noël pendant les premiers jours de leur intimité amoureuse…

Elle avait eu, d’abord, un peu de surprise et d’inquiétude, parce qu’il était resté, dans ses bras, si mélancolique, et si grave, et parfois si sombre !… Il l’avait traitée, non pas comme une maîtresse désirée, mais comme une petite épouse ignorante. Les caresses n’abolissaient pas en lui une pensée fixe, et peut-être la volonté de ne pas s’alanguir, de ne pas céder à la puissance charnelle de la femme. Josanne redevenait anxieuse et timide.

Elle demandait :

— À quoi penses-tu ?

— À rien, ma chérie…

— Tu n’es pas heureux ?

— Mais si, très heureux…

— J’ai peur… j’ai peur…

— De quoi, mon amour ?

— J’ai peur de t’avoir déçu…

— Comment ?

— Je ne suis pas sûre de te plaire…