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— Vous êtes si compatissante !… Ce monsieur est venu gémir près de vous !… Pas assez longtemps, j’imagine, car vous auriez fini par vous attendrir, par le consoler…

Josanne se leva brusquement :

— Noël ! je peux tout supporter de vous, la colère, les reproches, même l’injustice… mais l’ironie, non ! Je ne peux pas !…

— Josanne !… ma chérie ! Pardon !… Je suis absurde !… Je suis méchant !… Josanne !

Il la força de se rasseoir, mit un genou en terre, près d’elle, et l’entoura de ses bras. Alors, elle recommença de pleurer, désespérément :

— Vous ne m’aimez plus !… Vous m’obligez à dire des choses affreuses, qui m’humilient… qui vous déchirent !…

— Oh ! ma Josanne, je souffre tant !… J’ai le cœur à vif… Tout me fait mal !… Et vous me demandez d’être juste, d’être logique !… Je puis être généreux et lâche, bon et méchant, dans la même minute, selon qu’un mot de vous m’exaspère ou m’attendrit !… Ah ! ma raison et ma sensibilité ne s’accordent guère !… Parbleu ! je le sais bien, que je n’ai pas le droit de juger, que, sans doute, à votre place, j’aurais agi comme vous !… Je ne suis pas insensible à la douleur des autres ! Je ne suis pas égoïste… Et je me rappelle que j’ai voulu m’affranchir de préjugés ordinaires et de la morale dogmatique !… Eh oui ! J’ai dit, j’ai écrit qu’il n’y avait pas deux honneurs, l’un masculin, l’autre féminin ! Mais ce qui était pour moi une théorie, c’était pour vous, la réalité quotidienne !… Et maintenant que je