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le corps sains, elle sera bien armée contre les tentations de débauche… Et, si elle se trompe dans son choix, elle saura que son erreur n’est pas infamante, qu’elle ne la traînera pas, toute sa vie, comme un boulet, et qu’elle pourra mériter l’estime et l’amour d’un honnête homme.

» Cela suppose une totale révolution de nos mœurs ?… Mais elle est à moitié faite, elle se fait tous les jours, cette révolution ! Que de préjugés disparus, déjà !… La réprobation des « honnêtes gens » ne frappe plus ni l’enfant naturel, ni la femme divorcée ; on tolère, on excuse certaines unions libres, et telle femme s’est acquis par le prestige du talent le droit de vivre à son gré, — ce droit qu’on reconnaissait naguère aux grandes actrices seulement !… Ce sont les symptômes d’un état de choses qui… »


— Madame veut acheter ce livre ? demanda un commis qui trouvait sans doute que la lecture avait trop duré.

Josanne devint pourpre… Elle répondit spontanément :

— Oui.

— C’est trois francs…

Trois francs ! Et l’on était à la fin du mois… Josanne sentit la pointe d’un remords ; mais elle ouvrit son porte-monnaie. Le commis enveloppait le livre.

— Merci… Dites-moi l’heure, maintenant.

— Sept heures moins cinq, madame…

Maurice ne viendrait pas !… Josanne entrevit, dans un éclair, le petit logement de la rue Amyot : —