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— Je n’aurais pas voulu parler si tôt… Mais… j’ai été surprise… Je n’ai pas su cacher mon émotion… Pourquoi ?… Je l’ignore moi-même… Ah ! si près, si près de vous, comment aurais-je pu dissimuler ce que vous saviez déjà, Noël ?… car vous le saviez, dites ?… Et j’étais sûre de moi autant, plus que de vous…

Sa pâleur se colore un peu. Sa bouche se détend dans un sourire craintif. Mais Noël, dominé par l’idée secrète et fixe qui le torture, Noël broie les mains de Josanne, la presse contre le rocher.

— Le présent !… Je veux croire que le présent est à moi, Josanne ! Je veux croire que vous m’aimez, et que vous êtes loyale… Mais il y a…

— Quoi ?

— Le passé…

— Noël !

— Le passé que je devine… Hélas ! je n’attendais pas de vous ces paroles d’amour, avant la confidence que vous me promettiez, que vous me deviez, que j’eusse accueillie avec douceur et tristesse, oui, quelle qu’elle fût… Et alors seulement je vous aurais dit…

Elle jette un cri :

— Mon Dieu !… Qu’ai-je fait !… Quelle imprudence affreuse !… Cet aveu d’un si grand malheur, d’un si grand mal, comment l’accueillerez-vous ?… Oh ! mon Dieu !… mon Dieu ! qu’ai-je fait ?

— Josanne, mon amie, ne tremblez pas, ne pleurez pas… Ma Josanne !

— J’étais si sensible à tout, si nerveuse, et c’était un tel bonheur d’être près de vous !… J’ai perdu la tête. Je me suis trahie… Et, tout à coup, là, vous avez montré tant de violence !