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dus, longue, svelte, agile, silencieuse. Et elle s’arrête, comme une colombe se pose, dans un large creux de rocher où s’amassent des feuilles mortes.

Noël la rejoint. Elle met ses mains sur ses yeux ; elle respire lentement, profondément, si oppressée !…

Noël lui dit :

— Quoi ?… Vous ne voulez plus me regarder ?… Regardez-moi ! les yeux dans les yeux ! Il le faut !… Je veux que vous me regardiez, Josanne !

Il lui saisit les poignets, la retient, fascinée, sous son regard clair.

— Oh ! mon ami… Par grâce… Croyez-moi… Je…

— Josanne !… Je voulais attendre, vous éprouver, parce que vos réserves, vos réticences avaient mis en moi un doute… Mais je suis à bout de forces !… Il faut parler maintenant… Oh ! je vous en supplie, soyez clairvoyante, soyez sincère !… Cherchez en vous, cherchez bien, s’il n’y a rien… rien que…

Elle se taisait ; elle se recueille. Sa pensée descend dans le mystère de l’âme, dans l’ombre, dans l’ombre… Et Noël voit cette pensée qui remonte, qui affleure au jour, dans les prunelles de Josanne.

Elle murmure :

— Rien… rien… Noël ! Je vous le jure… il n’y a rien de vivant en moi que le présent… vous…

Et, dans un souffle qui expire, tout bas, elle achève :

— L’amour…

Comme ils sont pâles et tremblants ! Josanne s’appuie au rocher. Ses pieds, mal assurés, foulent les feuilles sèches dont on entend le bruissement soyeux. Des taches de soleil dansent sur sa robe. Elle reprend :