Page:Tinayre - La Rebelle.djvu/241

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Les yeux fermés, elle abandonnait sa tête en arrière. Entre ses cils, elle apercevait des arbres, des maisons, un château, des murs, une grille, images fragmentaires qui défilaient, interrompues par des espaces d’ombre lorsque les paupières de Josanne s’abaissaient tout à fait.

Elle ne savait pas que Noël la tenait contre son épaule. Elle sombrait dans la douceur et la langueur, perdant toute notion du temps et de la distance. À Dampierre, elle fit un effort pour se ranimer, et, voyant la tête de Noël si près de la sienne, elle rougit et se redressa.

— Oh ! pardon… Je…

Il n’écouta pas ses excuses, et ne parut soucieux que de sa santé.

Le déjeuner était prêt, dans une salle à manger pseudo-gothique. Noël parla gaiement, de choses banales, comme s’il eût désiré amuser Josanne et non pas l’émouvoir. Elle s’irritait un peu de cette réserve volontaire, et un sentiment obscur, léger dépit, coquetterie inconsciente, inquiétude amoureuse, l’enhardissait…

Elle refusa de rentrer à Paris, déclara qu’elle était tout à fait bien portante et qu’elle voulait voir les Vaux-de-Cernay.

Dans la voiture, elle s’accommoda sur les coussins, et, sans attendre le conseil de Noël, elle enleva son grand chapeau. La capote rabattue les abritait de la poussière. Le sol surchauffé réverbérait le ciel ardent.

— Mon amie ?

— Mon ami ?