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— Vous avez travaillé ?

— Mal.

— Et vu des gens ?

— Trop, toujours trop… Je vous raconterai cela… plus tard… Aujourd’hui, je suis tout étourdi de vous revoir. Je ne suis pas éloquent. Je me rattraperai.

Il embrassa le petit Claude.

— Toi, mon bonhomme, tu me plais beaucoup… Tu es gentil : tu n’as pas l’air bête, et tu ressembles à ta maman… C’est vrai, mon amie, votre fils vous ressemble. Il est tout de vous ; il est vous-même, et j’en suis charmé.

Il voit que Josanne a changé de couleur et il s’effraie :

— Vous êtes souffrante ?

— Oui. J’ai dû prendre froid, cette nuit. Je ne pouvais pas dormir ; je suis restée à la fenêtre. La nuit était si belle !…

— Très belle. Je me suis promené sur les quais. Je suis allé jusque devant votre maison… Mais vous êtes toute pâlotte, ma pauvre amie ! Cela me navre.

Il regarde Josanne avec des yeux si beaux d’amour et d’inquiétude qu’elle sent toute son âme aller vers lui. Elle veut le rassurer, Noël l’interrompt :

— Vous n’êtes pas gaie, je le sens… Vous avez eu un chagrin, grand ou petit ?… Dites… cette personne qui est descendue de wagon en même temps que vous, c’est une amie de votre tante ?

— Non, c’est la femme d’un négociant en soieries, cousin de monsieur Malivois… Et monsieur Malivois était l’ancien patron de mon mari… J’ai donné naguère des leçons de piano à la fille de cette dame…