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petit Claude par la main et s’en retournèrent chez elles.

Le ciel ne s’était pas obscurci. Il s’était fané comme une fleur, comme ces grandes mauves qui se décolorent doucement au soir chaud des chaudes journées. La lune n’était pas levée, mais on la devinait prête à surgir, à l’angle d’un toit, à la pointe d’un clocher, entre les ramures d’un arbre. Tout à coup, elle serait là, sans qu’on l’ait vue paraître. Elle serait là, ronde, nacrée, quasi transparente, à une place imprévue du ciel : et, l’azur se fonçant peu à peu, jusqu’au violet sombre, elle deviendrait, la blanche lune, toute d’or, puis toute d’argent…

Josanne imaginait Noël près d’elle, et s’appuyant à son bras ; elle lui disait : « Mon ami… » Ensemble ils goûtaient l’heure exquise…

Rentrée au logis, elle coucha son enfant, ferma sa malle, et se coucha à son tour. Elle s’endormit, avec la lettre de Noël sur sa poitrine, sous ses mains croisées.

Elle dormit, elle rêva… Elle était dans un jardin, sur un banc rustique. Le jardin était tout blanc d’arbres en fleur ; l’herbe était pleine de violettes.

Soudain Josanne aperçut Noël Delysle, assis près d’elle. Il disait :

— Le printemps est venu, le vrai printemps…

Il souriait. Elle s’appuya un peu, très peu, contre lui… Elle n’osait pas. Mais il la prit dans ses bras, et elle fut si heureuse, si heureuse, qu’elle souhaita ne plus s’en aller, jamais. Il pencha la tête vers elle ; elle leva la tête vers lui, et leurs lèvres se rencontrèrent…