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malheur de l’humanité… Quand j’étais collégien, je rêvais d’être Don Juan ou Napoléon… Je voyais la vie comme une course d’obstacles… Et plus tard, j’ai aimé l’inconnu des voyages, l’aventure, le danger… J’ai aimé les pays qui se dérobaient et les femmes qui se refusaient…

Josanne eut un petit sursaut… Noël changea de ton :

— Oh ! ne croyez pas…

Il n’osait achever sa phrase, exprimer toute sa pensée… Josanne dit :

— Oui… c’est la difficulté seulement qui vous attire…

— Pas seulement… Me blâmez-vous de préférer le Mont-Blanc à Montmartre ? J’ai les mêmes préférences, dans l’ordre sentimental… J’aime les âmes fermées, qui s’ouvrent peu à peu, pour moi seul… Les plus belles sont les moins accessibles…

— Alors, dit Josanne, pourquoi voulez-vous aller au Japon ?…

Noël resta stupéfait.

— Vous savez ?…

— Oui… c’est très banal, le Japon ! Il y a des chemins de fer et des messieurs jaunes au chapeau haut de forme. Vous ne rencontrerez pas de tigres et ne risquerez même pas d’être martyrisé.

Elle badinait, mais elle n’était pas gaie. Elle regardait obstinément le journal anglais, — le Weekly — déployé devant elle.

— Mais comment savez-vous ?

— Par Foucart… Est-ce que vous partirez bientôt ? Elle pensait :