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aussi de les moraliser, d’éveiller en elles le sentiment maternel. Ces dames du Comité leur font des lectures, de petites conférences…

— C’est admirable, dit Josanne. Et le résultat ?…

— Ah ! le résultat !… Certes, notre influence est bienfaisante. Nos hospitalisées s’améliorent au physique et au moral. Elles déclarent, toutes, qu’elles élèveront leur enfant… Mais à la Clinique, à la Maternité, elles subissent de fâcheux voisinages… D’autres femmes, — des aînées. — leur donnent de mauvais conseils : « Vous êtes jeune. Vous trouverez quelqu’un… Faut pas vous embarrasser d’un enfant… Moi, j’ai mis tous mes gosses à l’Assistance… » Et la mère, qui n’a pas eu le temps d’être vraiment mère, se laisse persuader…

— Souvent ?

— Trop souvent. On dit que les philanthropes sont philanthropes parce qu’ils sont optimistes ! C’est une idée bien naïve… Les personnes qui se vouent au soulagement des malheureux connaissent bientôt, par une expérience quotidienne, les vices, les tares, les laideurs de l’humanité… Ce n’est pas pour eux, c’est malgré eux qu’il faut aimer les misérables… Les gens qui font le bien doivent perdre leurs illusions, s’ils veulent persévérer. Les optimistes, les enthousiastes, vite déçus, se découragent…

Mademoiselle Bon dit à regret :

— Oui, vous avez raison… On se lasserait peut-être de la charité, si l’on n’avait pas la certitude qu’elle est une œuvre de réparation, une forme de la justice…

— Ces filles que vous allez voir, reprit madame Platel, vous étonneront par leur insouciance… Sé-