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— Enfin, soyez sincère. Pourquoi m’aimez-vous ?

Elle murmura en regardant le soleil qui jouait dans les feuilles :

— Parce que je ne vous trouve ni vieux, ni laid, ni désagréable, quoi que vous en disiez… Je veux que vous soyez heureux, mais si quelque pitié s’est mêlée à mon amour, cet amour, Étienne, existait avant elle… Je vous aime parce que je vous crains… parce que… Est-ce que je sais ? Mais, si je ne vous aimais pas, supporterais-je vos lèvres sur ma joue ?

— Ils ne vous troublent donc pas, ces baisers ? dit-il en se rapprochant d’elle…

— Pas désagréablement… mais ils me troublent… Ah ! ils me coulent jusqu’au cœur… Ciel ! que me faites-vous dire là ! Vous voyez bien, monsieur, que ce vin rose m’a grisée… Allons nous promener dans les bois.

Ils repartirent, Étienne tout songeur, tout enfiévré de l’aveu net et naïf arraché à Jacqueline. Un sentier descendait au creux d’un vallon. Ils le suivirent et se reposèrent sur la pente où croissaient des bouleaux et de petits châtaigniers. En écartant les branches, madame Vallier eut un cri de plaisir.