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hôtes jusqu’à la diligence, Augustin et Vitalis montèrent ensemble la rue Bordier.

— Eh bien ? dit le prêtre avec une malice affectueuse, y aura-t-il promesse de mariage entre mademoiselle Eulalie Loiselier et M. Augustin de Chanteprie ?

Le jeune homme se prit à rire :

— Vous n’avez donc pas regardé la belle-mère ?… Elle cachait mal sa rancune contre l’innocente mademoiselle Cariste. Ces gens regrettent d’être venus si loin pour voir un huron, un iroquois !

— Dame !… vous n’étiez pas brillant, ce soir. On aurait dit que vous pensiez à tout autre chose qu’à des fiançailles.

— Mon cher ami, les Loiselier sont peut-être meilleurs et plus intelligents qu’ils n’en ont l’air, mais nous n’avons rien de commun, eux et moi : ni les goûts, ni les idées, ni les habitudes. Ils m’ont ennuyé ; je leur ai paru très ridicule…

— Et la jeune fille ?

— Elle n’a presque rien dit ; je l’ai vue à peine… Elle n’existe pas pour moi… Tout de même, je me sens joyeux, allègre, délivré !… Je respire !… Oui, comme si je venais d’échapper à un grand péril !…

— Prenez garde, dit l’abbé. Prenez garde de ne pas tomber de Charybde en Scylla. Il n’y a pas que des demoiselles Loiselier au monde… Voici votre porte, allez rassurer votre mère. Bonsoir, mon ami.

— Bonsoir.