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— Voilà de belles et sages paroles qu’il faut méditer, dit madame de Chanteprie. Si votre choix tombait sur une personne dissipée, mondaine, et qui ne fût pas sincèrement attachée à notre sainte religion, je m’opposerais de tout mon pouvoir à votre mariage. Mais puisqu’on dit tant de bien de ces Loiselier…

Augustin se mit à rire :

— Ah ! ma chère mère, où irais-je prendre une personne « mondaine et dissipée » ? Il faudrait donc qu’elle vînt me chercher ici !… Et c’est peu probable… Mademoiselle Cariste et son cousin Chavançon ont grande envie de marier mademoiselle Loiselier. Ils ont pensé que je ferais volontiers, comme Racine, un de ces mariages où l’intérêt et la passion n’ont point de part, un mariage de raison, de sagesse… Et puis, vous le savez, quand bien même mademoiselle Loiselier serait riche et jolie à éblouir, je ne me marierais pas sans votre approbation et votre bénédiction.

— Vous êtes un bon fils, dit madame Angélique. Si M. Forgerus vous entendait, il serait content de vous.


Une odeur de tarte à la frangipane remplissait la maison des Courdimanche. On entendait un crépitement de friture, des cliquetis de porcelaine et de cristal. Quand la cuisinière embauchée pour la circonstance ouvrait la porte de la salle à manger, la table apparaissait très grande, avec ses flambeaux allumés, ses pyramides de fruits et de mousse, sa nappe raide cassée aux coins.

Dans le salon, les fauteuils de reps vert garnis de