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sage comme une image ; un bon petit jeune homme qui a des cheveux plats et de grands pieds.

— Quelle idée, Fanny !… Tu restes ?… Je vais me reposer dans la maison. Ne vous mettez pas en peine de moi, ma bonne femme.

Mais la mère Testard, obséquieuse et plaintive maintenant, s’attachait aux pas de la vieille dame. Elles entrèrent dans la cuisine de la ferme.

Fanny s’accouda sur la barrière branlante. De l’autre côté de la route, la plaine mi-blé, mi-bruyère, ceinte de forêts, exhalait son parfum de printemps, ce parfum vert qui grise les bêtes et les hommes. Et Fanny, un peu alanguie par la marche et le grand air, s’engourdissait au soleil tiède, et regardait le cercle immense des bois, les humbles maisons du Chêne-Pourpre, égrenées toutes sur le même bord du chemin, et, très loin, la tache mouvante d’une voiture qui arrivait.

La voiture s’arrêta devant la ferme. Un jeune homme en descendit, et passa devant la jeune femme. Il était grand, mince, vêtu d’un costume de velours brun. En dix secondes, il avait salué l’étrangère, poussé la porte, traversé la cour. Et le chien d’un aboi joyeux fêtait le maître.

Dans la maison, maintenant, c’était un brouhaha de voix, d’explications confuses et, soudain, la vieille dame sortit, escortée par le jeune homme.

— Fanny ! cria-t-elle, M. de Chanteprie s’offre à nous montrer la maison… Trois pièces, un bûcher, un jardin, un bois ; du silence, de l’ombre, une vue charmante. Cela te plaît-il ?

— Il faut d’abord que cela vous plaise, ma tante.