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LA MAISON DU PÉCHÉ

— Toujours.

— Ah ! que je suis lasse I gémit la passante d’un ton navré.

Elle portait un gros paquet noué dans un torchon, et, comme elle rejetait son buste en arrière, on voyait sous la robe d’indienne bleue le ferme relief de sa jeune gorge et la rondeur de sa hanche. Le col dégrafé bâillait sur un triangle de chair grasse, moite de sueur. Et sous le chapeau de paille commune, noué d’un cordon noir, le visage potelé, encadré de cheveux roux, semblait une rose ardente.

— Oh ! que je suis lasse !… et que c’est lourd !… et que j’ai chaud !

Le jeune homme s’apitoya.

— Vous venez de loin ?

— Du Petit-Neauphle.

— Et vous allez ?

— À Hautfort-le-Vieux, voir ma tante.

— Donnez-moi votre paquet. Vous le reprendrez quand nous serons au carrefour.

Il prit le ballot, qu’il plaça dans la voiture. Puis une honte lui vint, à voir cette créature, une enfant, une pauvresse, s’écorcher les pieds aux cailloux.

— Montez donc vous-même, puisque vous êtes si fatiguée. Vous vous reposerez un moment.

— Ah ! bien volontiers, monsieur. Ça n’est pas de refus. Vous êtes bien aimable.

D’un bond, elle fut près de lui, et lui, d’un bond, sauta par terre, et se mit à conduire le cheval par la bride, sans parler à la jeune fille, sans la regarder.

Elle murmura :

— Monsieur ?…