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giles consciences féminines, il déplorait maintenant ce relâchement de la discipline chrétienne qui ne permet plus la pénitence publique après le scandale public du péché. Et les dames frémissaient, voyaient déjà M. de Chanteprie vêtu d’un sac, la corde au cou, la cendre sur la tête, prosterné aux portes de Saint-Jean, et confessant son péché devant l’assemblée des fidèles.

Augustin voulait ignorer la curiosité des regards, la bêtise ou la malice des propos. Par un effort d’humilité, violentant les pudeurs de son âme, il avait subi le petit supplice d’une exhibition à la grand’messe, supplice imposé par M. Le Tourneur, comme le simulacre atténué de l’impossible amende honorable. Depuis ce jour, il restait enfermé dans sa maison, et, quand il traversait, par hasard, les rues de Hautfort, il ne parlait à personne.

— Eh bien, votre maître n’est pas venu vous voir ? disaient les commères à Jacquine Pérou. Il y a une nouvelle gouvernante, et une cuisinière, chez les Chanteprie. Vous voilà remplacée.

La Chavoche souriait de mépris et semblait dire : « Ils ne me remplaceront pas !… » Dans la bicoque qu’elle avait louée, près de l’église Saint-Jean, elle vivait seule, exécrée des voisines, cultivant un petit jardin et soignant deux chats familiers. L’après-midi, elle s’asseyait dans la cour de son logis, et les gamins s’avançaient jusqu’à la porte entre-bâillée, pour voir la redoutable Chavoche qui branlait la tête et parlait toute seule en tricotant.

Un jour, comme Jacquine rêvassait ainsi, se chauffant au soleil d’automne, M. de Chanteprie entra dans la cour.