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LA MAISON DU PÉCHÉ

l’admirant votre… votre intransigeance, naturellement opposée à mon opportunisme, si j’ose employer ce mot emprunté au jargon parlementaire. Moi, je suis plein de miséricorde pour les gens qui veulent bien donner un peu d’eux-mêmes au bon Dieu… Quand ils ont mis le petit doigt dans l’engrenage, je sais bien que le corps tout entier y passera… Il y a beaucoup de ces âmes qui tiennent encore à nous par le lien de la tradition, de l’habitude, et… faut-il le dire ?… de la couardise. Elles ne font guère d’efforts pour gagner le paradis, mais elles sont capables de faire un petit effort pour éviter l’enfer… Faut-il les envoyer au diable ?… Ah ! que non point… Ces indifférents, ces médiocres, composent la masse flottante où se recrute le petit nombre des élus. Ces âmes-là, je n’en veux décourager ou rebuter aucune… En temporisant, en profitant des circonstances favorables, je conduis mes gens où ils ne croyaient point aller, peut-être pas tout près du bon Dieu, au premier rang des saints, mais fort loin du diable.

— Pourtant, dit Forgerus, Jésus n’aimait pas les tièdes. Il a dit : « Je les vomirai de ma bouche… » Je ne suis pas sûr que l’extrême indulgence des prêtres fortifie la foi des pénitents. Considérez la rigueur des évêques et des papes, dans l’Église primitive, lorsque la légèreté des paroles, l’imprudence des écrits, le mépris des sacrements étaient tenus pour des crimes, et sévèrement châtiés. Alors les jeûnes étaient fréquents et rigoureux, les pénitences publiques et terribles. Cette rude discipline faisait des âmes vigoureuses.

— Il faut marcher avec son temps, répliqua