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LA MAISON DU PÉCHÉ

et des confitures, reprisait les housses des meubles et les rideaux éblouissants des fenêtres. Chaque fois que l’heure sonnait, elle poussait une oraison jaculatoire qui lui valait cinquante jours d’indulgence… Et c’était le bonheur, un bonheur tiède comme une chaufferette de vieille fille, clos comme un béguinage, pale comme un printemps du Nord.

L’abbé Le Tourneur, placé à sa gauche, s’empressait à la servir. Jeune encore, avenant, de belle taille, le menton gras et la joue rose, l’œil à fleur de tête, les cheveux argentés, il représentait le type accompli du curé de grande paroisse, excellent fonctionnaire et gentleman correct. Depuis quelques années, il collaborait à un journal du chef-lieu, la Croix Rambolitaine, où il prêchait la concorde, l’indulgence et l’union « entre tous les gens honnêtes mécontents du régime actuel ».

Il raconta qu’il avait fait une conférence chez son doyen, le curé du Petit-Neauphle et qu’un sien confrère, le jeune curé de Rouvrenoir, lui avait reproché d’être trop bénévole et conciliant.

— L’abbé Vitalis est tout frais émoulu du séminaire et son zèle apostolique est parfois imprudent. À trop presser les âmes paresseuses, on risque de les fatiguer… et de les dégoûter. Dieu ne veut pas la mort du pécheur…

— Il veut sa conversion, dit madame de Chanteprie.

— Je sais que vous êtes sévère pour les tièdes, répondit M. Le Tourneur sur un ton d’affectueux respect. Oui, oui, par l’esprit, par le tempérament, vous êtes un peu janséniste… Oh ! je ne mets pas en doute la pureté de votre foi !… Mais, je reconnais en