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qu’ordonnez-vous ?… Dois-je quitter cette maison ? Ma présence vous est-elle odieuse ?…

— Vous êtes majeur et libre. La maison vous appartient. J’espérais y mourir. Mais le jour où vous conduiriez ici cette créature, je m’en irais mourir n’importe où.

Augustin répondit tristement :

— Vous nous faites injure, à elle et à moi. Quoi qu’il arrive, vous serez seule maîtresse ici, et votre volonté sera respectée… Mais, puisque nous parlons d’elle, oh ! pour la dernière fois, laissez-moi vous assurer qu’elle n’est pas responsable de… ce qui est arrivé… On l’a calomniée, sans doute…

On… c’est-à-dire l’abbé Le Tourneur, qui la connaît bien ?

— L’abbé Le Tourneur peut être irrité contre moi… Mais pourquoi contre elle ?… Elle n’a rien fait. C’est une âme égarée ; ce n’est pas une âme vile. Je ne souffrirais pas qu’on lui prête des intentions, des calculs odieux dont elle est incapable. Tout son crime a été de trop m’aimer.

— Vous osez me parler d’elle, à moi ! s’écria madame de Chanteprie. Une femme de rien, une aventurière !… Croyez-vous que je fasse beaucoup de différence entre une prostituée et cette femme-la ?

— Vous parler d’une femme que vous ne connaissez pas, que vous haïssez bien injustement. Elle ne mérite pas tant de sévérité… Si vous lisiez dans son cœur, vous-même vous ne sauriez que la plaindre…

— Elle est, à mes yeux, l’instrument de votre perdition… Ah ! certes, il faut qu’elle soit bien puissante pour vous avoir si rapidement, si profondément