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parmi les arbres morts et les ruines, il respirait, le cœur allègre… Il n’était plus seul.

Les souvenirs de la soirée qui l’avaient obsédé pendant le voyage se brouillaient dans sa mémoire. Il était fatigué. Il avait grand sommeil. Dormant à moitié, il entra dans la maison, dans le salon où veillait sa mère. Elle était seule, au coin du feu, sous la lampe dont la lumière rayonnait doucement. Elle le regardait venir ; elle ne faisait pas un geste ; elle ne disait pas un mot.

— J’ai manqué le train de dix heures et demie, commença-t-il. Vous avez eu la bonté de me renvoyer la voiture, mais pourquoi m’attendre, si tard ?… Vous…

— Je vous aurais attendu toute la nuit, dit Thérèse-Angélique. Mais je n’étais pas sûre que vous auriez le courage de quitter… vos hôtes.

— Je vous avais promis…

— Eh ! oui… Vous êtes fidèle à vos promesses. Vous êtes un fils respectueux. Vous ne mentez jamais, n’est-ce pas, jamais ?

Il demeurait muet, immobile au milieu du salon, dans ses vêtements trempés de pluie, et il était tellement brisé de fatigue que toute cette scène lui semblait tenir du cauchemar.

— Vous ne répondez pas ! Soit ! Pourquoi mentiriez-vous encore, comme vous avez menti hier et aujourd’hui ? Je sais tout, mon fils, je sais tout.

Augustin tressaillit et regarda sa mère, d’un air éperdu.

— Oui, je sais tout. Je vous ai laissé partir ce soir, pour interroger, à loisir, M. Le Tourneur et les