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et la flamme claire jaillit, très haut. Une couleur pourpre, mobile, à reflets dansants, se répandit sur les boiseries grisâtres, sur les rideaux de gourgouran fané dont l’exquise nuance hésitait entre les tons du safran pâli et ceux de la rose mourante. L’image rétrécie du foyer brilla au flanc cintré de la commode, aux reliefs des bronzes brunis. Fanny, debout, accoudée au marbre de la cheminée, recevait la lueur brûlante. Le violet de sa robe rougissait comme certains feuillages à l’automne, mais le haut de la gorge et le visage incliné demeuraient dans une chaude pénombre.

— Ne sommes-nous pas bien ? dit Augustin. Asseyez-vous là, dans cette bergère, et laissez-moi me reposer à vos pieds, mon cher amour. C’est notre première veillée au coin du feu… Écoutez le vent qui siffle et tourne sur les ardoises… Rêvons que nous sommes époux.

— Hélas ! il faudra nous séparer, tout à l’heure.

— Pourquoi ne voulez-vous plus que j’aille aux Trois-Tilleuls ?

— Parce que j’aime ce pavillon… parce que mon souvenir, ici, vous enveloppe mieux, vous laisse, jour et nuit, l’illusion que je suis présente ou proche… Je pars, mais je ne vous quitte pas… Et, dans cette maison vide, vous ne vous sentez pas seul.

— Chère, chère Fanny ! C’est vrai… Il me semble que vous m’appartenez enfin, pendant ces heures où vous êtes chez moi, toute à moi.

— Non pas toute à vous… pas encore.

— Ah ! je suis heureux ! je suis bien !… Les doigts de Fanny jouaient dans les cheveux blonds du jeune homme. Il fermait les yeux, envahi