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des pensionnaires. Il insistait même pour que madame Angélique restât dans le Midi au moins six semaines. Et devant l’obstiné refus de la malade, Augustin songeait à faire intervenir l’abbé Le Tourneur.

— J’admire et je déplore le courage de ma mère. Elle accepte la souffrance comme une grâce purificatrice. Pour un peu, elle dirait qu’un chrétien doit rougir de n’être point malade, et qu’une trop bonne santé est une honte aux personnes pénitentes. Elle supporte ses maux avec patience, et avec impatience les remèdes du médecin.

— Vous n’avez donc aucun pouvoir sur elle, vous, son fils ?… Est-ce que votre mère vous fait peur ?

— Peur, non. Mais je suis saisi de respect quand je pénètre dans cette chambre nue et pauvre où ma mère vit depuis quinze ans. Ce que je devine de ses austérités me rend tout humble devant elle. Comment oserais-je lui donner des conseils, discuter sa volonté ?

— Voilà une singulière façon de comprendre la tendresse maternelle et l’amour filial !… Votre mère se tuerait pour la plus grande gloire de Dieu que vous diriez encore amen !

— Si vous connaissiez ma mère, vous sauriez qu’elle ne veut point être aimée comme une autre…

— Je m’en aperçois… Ah ! mon cher Augustin, vous compliquez à plaisir les choses les plus simples… Vous ne pouvez remuer un doigt sans déranger Dieu et le diable…

— Ne plaisantez pas de cette façon, Fanny… Vous êtes bien nerveuse !…

En elle-même, elle pensait :

« Suis-je lâche !… Je devrais lui dire la vérité :