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catéchisme et de la première communion. D’avoir cru, tout enfants, à l’immortalité de l’âme, il leur restait un fond de crainte obscure et d’obscure espérance. Ces fanfarons d’athéisme, nourris de la morale évangélique, demeuraient chrétiens par les sentiments et par les habitudes… Vous comprenez maintenant pourquoi l’Église attache tant d’importance à la première éducation religieuse… Mais vous, madame, vous n’avez pas reçu cette première éducation. Vous portez en vous les germes du doute. Il faut vous défricher l’âme, d’abord… Et c’est ce que M. Le Tourneur essaie de faire.

— Votre Dieu, s’il existe, sait pourtant que je voudrais croire, s’écria Fanny. Il doit m’aider…

— Aidez-vous, Dieu vous aidera… Oui, madame, Dieu sait que vous voulez croire, mais il sait aussi pourquoi vous voulez croire, et que vous cherchez seulement dans la foi le moyen d’assurer votre bonheur… Vous apportez dans le sanctuaire une arrière-pensée toute profane. Vous n’aimez pas Dieu pour lui-même et par-dessus tout : vous aimez M. de Chanteprie… Si ce jeune homme n’était pas un bon chrétien, s’il n’avait pas exercé sur votre esprit une sorte de violence, vous fussiez demeurée tranquille dans votre incrédulité…

— Peut-être… probablement…

— Et puis vous raisonnez trop… À quoi bon ?… Vous espérez que ce pauvre M. Le Tourneur vous prouvera l’existence de Dieu, l’immortalité de l’âme, etc… Mais Pascal a dit, depuis longtemps, que la religion n’est pas certaine pour la raison. On ne prouve pas Dieu ; on le sent. « La foi, c’est Dieu sensible au