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selon qu’il y aura des biens éternels à espérer ou non. et qu’il est impossible de faire une démarche avec sens et jugement, qu’en la réglant par la vue de ce point qui doit être notre dernier objet. » M. de Chanteprie s’épouvantait avec Pascal de voir, « dans un même cœur et dans un même temps, une extrême sensibilité pour les moindres choses et une étrange indifférence pour les plus grandes… » Il y reconnaissait « cet enchantement incompréhensible, cet assoupissement surnaturel qui marque une force toute-puissante qui le cause… »

Que faire ?… Éveiller l’âme engourdie, et la mettre peu à peu dans la situation du personnage « qui ayant toujours vécu dans une ignorance générale et dans une indifférence à l’égard de toutes choses, et surtout à l’égard de soi-même, vient enfin à examiner ce qu’il est… Il ne peut plus après cela demeurer dans l’indifférence, s’il a tant soit peu de raison ; et quelque insensible qu’il ait été jusqu’alors, il doit souhaiter, après avoir connu ce qu’il est, de connaître aussi d’où il vient et ce qu’il doit devenir… » Mais il chercherait inutilement à s’éclairer par les lumières naturelles : la dernière démarche de la raison, c’est de reconnaître qu’il y a une infinité de choses qui la surpassent, et « il n’y a rien de si conforme à la raison que ce désaveu de la raison ». Les chrétiens, en exposant leur croyance au monde, déclarent que c’est « une folie, stultitiam ». Et les personnes qui, s’adressant aux impies, essayent de prouver l’existence de Dieu par les ouvrages de la nature, le cours de la lune et des planètes, par des preuves physiques et même par des preuves métaphysiques, « leur donnent sujet de