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il tourna un joli compliment à Marie qui ressemblait, dit-il, à son père et à sa mère, et aussi à une infante de Vélasquez… La robe blanche voilée de noir transparent, les perles au cou, la cocarde rose à la ceinture, les cheveux cendrés et argentés… Oui, c’était l’Infante !

M. Wallers approuva ; madame Van Coppenolle, demanda si elle avait, elle aussi, le type des dames de Vélasquez, bien qu’elle sût très bien ne pas l’avoir, mais elle aimait à provoquer les louanges. M. di Toma, depuis qu’il était entré dans le salon, n’avait regardé qu’elle : il profita de la circonstance pour la regarder encore, en détail et de tout près. Elle posait, comme devant un peintre, inclinée et souriante dans le fauteuil de velours pourpre à dossier très haut. Grande et forte, avec de lourds cheveux dont elle savait adoucir la nuance ardente, elle avait les yeux verdâtres, le rire facile, la bouche mûre d’une Néréide de Rubens ; elle en avait la chair lactée, nacrée, presque soyeuse dans la lumière, et que l’ombre enveloppe d’une transparence azurée. Le sang riche de la jeunesse colorait de rose vif les lobes des oreilles, les joues, les lèvres, les mains mêmes, et les hommes qui déshabillaient des yeux ces formes provocantes devaient penser que le beau corps, nu, gras et blanc, était fleuri et fouetté du même rose.