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Marie s’assit, la tête dans les mains, et pria.

Pendant ce temps, Claude emportait dans sa solitude d’Arras le souvenir de la nuque dorée, du bras mince, de l’artère battante sous la peau fiévreuse. Et toute la nuit il veilla, malade d’amour, rêvant de cette pulsation plus troublante que le spasme de la volupté, comme s’il avait possédé, dans un baiser profond, le cœur même, le cœur mystérieux et caché de Marie…


« Tout est changé ! » a-t-elle dit… Maintenant, la pensée de Claude émerge des souvenirs profonds, et retrouve la réalité présente… Oui, tout est changé depuis cette dernière visite, depuis ce baiser. Et la lettre de Marie, ce voyage brusquement décidé, révèlent que la dévote timide a pris peur.

Pourtant Claude ne veut pas qu’elle parte. Il ne le veut pas !

Obstiné contre l’évidence, espérant modifier cette résolution qui le désespère, et où il devine l’influence souveraine du confesseur, Claude emploie l’éternelle tactique, celle qui réussit toujours quand la femme est tendre et qu’elle aime un peu. Il se plaint, pour se faire plaindre. Il dit sa solitude, les folles, les mauvaises pensées qui lui viennent…

La porte du poêle projette un reflet ardent